Que l’on soit un leader aspirant ou confirmé, douter est un pari bien risqué : il peut être, selon les perceptions, force ou faiblesse, symbole d’humanité et d’ouverture ou signe d’une incapacité à décider.
Nous vivons à une époque qui valorise l’expression de certitudes, internalisées ou non. Et nos leaders, lorsqu’on les dit forts, sont, ou du moins nous apparaissent, confiants parfois jusqu’à l’arrogance. Paradoxalement, lorsque ces mêmes leaders font preuve d’humilité et reconnaissent douter d’avoir pris les bonnes décisions, voire vivent des échecs, nous sommes forts nombreux à remettre en question leur leadership ou leur jugement.
Les questions que les dirigeants se posent sont en effet nombreuses : faut-il aller de l’avant avec ce projet d’envergure? Avec cette transaction? Avec ce changement de modèle d’affaires? Faut-il embaucher ou laisser aller telle personne? Est-ce une bonne idée de changer d’emploi, d’entreprise, de métier? Si l’on n’a pas toutes les informations en main, ne courrons-nous pas droit vers l’échec? Et si nous ne bougeons pas ou pas assez vite, n’en sera-t-il pas de même, quoique pas pour les mêmes raisons? Il y a tant de choses dont on peut douter et tant d’occasions de douter de soi…
Et si l’on postulait, comme Aristote, que le doute est le commencement de la sagesse? Et si l’on cherchait la valeur, l’utilité du doute? Et si l’on dissociait la capacité de douter (oui oui, la capacité) de la capacité de prendre des décisions?
Douter, c’est aussi savoir identifier les risques, c’est avoir envisagé l’échec. Libre à chacun alors d’utiliser ces précieuses informations à des fins de prévention… Il peut aussi être moins irritant, voire énervant, pour les personnes que vous souhaitez influencer de vous voir douter que d’avoir l’impression que vous faites preuve d’une certitude arrogante et pas toujours justifiée. Posez donc la question, à postériori, à plusieurs leaders et entrepreneurs dont les certitudes ou convictions se sont avérées non fondées et qui ont fait face à des commentaires pas toujours empathiques.
Cela étant dit, savoir douter et savoir utiliser ses doutes comme moteurs d’invention, parfois littéralement, ce n’est pas douter de soi. Prendre conscience de ce que l’on sait, et oser reconnaître ce que l’on ne sait pas, amène de la bienveillance à notre endroit et nous invite à en apprendre de ceux qui savent plus ou mieux que nous.
Et si nous doutions avec confiance?