Les entreprises font toujours face à des défis importants en matière de gestion de la diversité. Bien que plusieurs d’entre elles se soient penchées activement sur cet enjeu, les résultats tardent encore. Rien qu’entre les hommes et les femmes, on constate toujours des différences salariales de 10 %, et jusqu’à 25 % aux postes de direction. Certaines stratégies seraient-elles à revoir?

Des stratégies de sensibilisation ou coercitives?

Selon les travaux des professeurs Frank Dobbin et Alexandra Kalev, les entreprises misent souvent sur trois stratégies clés pour mieux gérer la diversité :

  • offrir des formations portant sur la diversité;
  • concevoir et utiliser des outils de gestion plus rigoureux (gestion de la performance, processus de recrutement, promotion, rémunération, etc.) qui limiteraient la présence ou l’émergence de gestes discriminatoires;
  • implanter des mécanismes de gestion de plainte pour protéger l’employé qui se sent lésé par des décisions administratives jugées discriminatoires.

Malheureusement, ces stratégies semblent avoir l’effet inverse…

  • En général, les formations sur la diversité sont imposées aux participants. Après quelques jours, certaines études observent qu’ils réagissent alors de façon inverse à ce qui leur était suggéré et démontrent davantage de réactions négatives face aux groupes cibles.
  • Ces mêmes formations mettent trop l’accent sur les impacts négatifs de la discrimination pour l’entreprise.
  • Le gestionnaire a souvent l’impression que les outils ou processus implantés lui retirent sa marge de manœuvre et son autonomie.
  • Quant aux mécanismes visant à protéger les employés, trop de plaintes, comme celles qui portent sur le harcèlement psychologique, sont invalidées. Une fois le mécanisme de gestion de la plainte exécuté, le climat de travail ne fait souvent qu’empirer.

Miser sur des expériences positives

On peut chercher à convaincre les employés que la diversité au travail est une bonne chose, qu’ils mettront l’organisation dans une situation difficile s’ils ne combattent pas leurs préjugés, mais il semble beaucoup plus efficace de prévoir des mécanismes concrets qui leur permettront de réaliser par eux-mêmes les avantages de la diversité pour eux et pour l’organisation.

Dobbin et Kalev suggèrent d’ailleurs des moyens plus performants pour favoriser l’émergence d’une plus grande diversité au travail :

  • impliquer les employés dans la définition des stratégies visant à favoriser la diversité dans leur milieu de travail;
  • faire participer les employés à des blitz de recrutement externe visant les groupes cibles;
  • favoriser les occasions de collaboration dans le cadre de projets spéciaux où les employés sont amenés à travailler avec des personnes issues des groupes cibles;
  • créer un comité composé de représentants de chaque unité administrative et de représentants des groupes cibles, qui ont la responsabilité d’analyser les statistiques clés (augmentations de salaire, promotions, recrutement, etc.) de leur unité d’appartenance; avec ces données, ils peuvent ensuite intervenir comme partenaires pour tenter de mieux comprendre ce qui se passe dans leur unité et trouver des solutions avec leurs collègues;
  • certaines organisations vont jusqu’à afficher ces informations dans le but de responsabiliser davantage les décideurs en cette matière.

En d’autres termes, plus on prévoit de mécanismes qui permettent aux acteurs clés d’être partie prenante et de « vivre » des expériences positives liées à la diversité, plus les impacts sont importants et positifs pour l’organisation.

Référence

Dobbin, F et A. Kalev (2016). « Why diversity programs fail », Harvard Business Review, juillet-août 2016.

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