Le défi du recrutement est-il différent au sein des PME? Si les techniques de recrutement sont similaires d’une industrie à l’autre, la stratégie qui les propulse doit certainement tenir compte de la réalité d’affaires et, en ce sens, il est indéniable que les PME sont confrontées à des défis qui leur sont propres.

Les défis

  1. Se vendre

    La majorité des PME sont méconnues et la notoriété des grandes entreprises leur fait souvent ombrage. Dans ce contexte, le premier enjeu des PME consiste à attirer l’attention des candidats potentiels, pour ensuite mettre en valeur les avantages qu’offrent leurs opportunités de carrière. Si on faisait un parallèle avec les enjeux d’affaires, on parlerait ici d’une stratégie de mise en marché d’un produit concurrençant celui d’une grande marque nationale. Autrement dit, c’est le défi de se « vendre ».

  2. Être stratégique

    Avant même de penser à la « vente », le réel défi d’une PME consiste à se donner les moyens de ses ambitions, c’est-à-dire bien comprendre l’enjeu stratégique du recrutement et ne pas sous-estimer les efforts et investissements requis pour trouver la bonne personne.

    S’en remettre au hasard n’est pas une méthode fiable pour trouver le meilleur candidat possible. Mieux vaut prendre le temps de bien définir ses besoins à long terme pour cibler le bon candidat. Or, dans un contexte de PME, les ressources sont plus limitées et le fait d’avoir des postes vacants a beaucoup d’impact. Souvent, on veut faire vite et on agit davantage en mode réactif, en se donnant peu de moyens.

  3. Être un bon investisseur

    Qu’on se le dise : la réalité financière et opérationnelle des PME est tout autre que celle des grandes entreprises. Dans une grande entreprise ayant une masse salariale de 10 millions de dollars, un salaire annuel de 80 000 $ ne représente même pas 1 % de la masse. Dans une PME où la masse salariale est de 800 000 $, ce même salaire représente 10 % de la masse.

    Puisque les petites entreprises doivent compter sur moins de ressources, l’impact d’une embauche en PME est beaucoup plus grand, autant sur le plan financier que sur le plan opérationnel. Dans cette perspective, une embauche en PME représente un investissement plus risqué qu’en grande entreprise. Pour maximiser leurs chances de succès, les PME ont avantage à bien connaître leurs besoins pour s’assurer d’embaucher la bonne ressource. L’analyse des besoins est primordiale afin d’établir une stratégie de recrutement durable. En contrepartie, une mauvaise analyse des besoins peut mener à d’importantes pertes financières pour l’organisation.

    Paradoxalement, les PME négligent très souvent leurs stratégies d’investissement en lien avec le capital humain, car cela leur donne l’impression de faire des économies. Dans une optique de recrutement durable, il faut maximiser les investissements en amont pour optimiser le gain en capital. En d’autres mots, le temps et l’investissement consentis au processus de recrutement seront rentables à moyen et à long terme. Cette perspective représente un défi dans le contexte où les petites entreprises ont des ressources et des moyens plus limités.

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Les stratégies

  1. Identifier et assumer les valeurs de l’entreprise : cohérence et succès à long terme

    L’exercice de définition des valeurs d’une entreprise peut paraître inutile aux yeux de plusieurs dirigeants de PME. Or, les valeurs organisationnelles ont un fort impact sur le succès à long terme d’une organisation puisqu’elles permettent d’harmoniser tous les efforts des employés.

    Alors que les compétences s’acquièrent avec le temps, les valeurs des employés sont intrinsèques. Les employés qui partagent les valeurs de l’organisation auront plus de succès et seront plus engagés envers celle-ci. Comme le dit l’adage : on embauche une personne pour ses compétences, mais on la congédie pour ses comportements.

    Les comportements en question sont directement liés aux valeurs. Dans un contexte de PME, les valeurs organisationnelles sont très intimement liées à celles des propriétaires-dirigeants. Il est donc important d’impliquer ces derniers pour identifier et définir les valeurs. Une fois cet exercice complété, il sera plus facile de sélectionner des employés qui développeront rapidement un sentiment d’appartenance, qui performeront et qui resteront à long terme dans l’organisation. De plus, si les valeurs organisationnelles transparaissent bien dans le processus de recrutement, elles interpelleront les candidats potentiels qui les partagent et pourront être le levier qui permettra de mettre la main sur la perle rare. (Voir le tableau 1 ci-dessous)

  2. Mettre de l’avant ses avantages concurrentiels pour tirer son épingle du jeu

    Il est vrai que les petites et moyennes entreprises ne jouissent pas de la notoriété des grandes organisations. Mais elles ont de nombreux avantages qui, malheureusement, ne sont pas suffisamment mis en valeur!

    Il est notamment plus facile en PME de travailler étroitement avec un haut dirigeant, ce qui peut représenter une chance exceptionnelle aux yeux de plusieurs candidats. Les sièges au comité de direction sont plus accessibles, et les employés ont de meilleures possibilités d’influencer concrètement la stratégie d’affaires. N’est-ce pas là un bel avantage concurrentiel pour un talentueux gestionnaire?

    Qu’il s’agisse de flexibilité dans les horaires de travail, d’un produit unique et passionnant, de progression de carrière par la polyvalence, de programmes de reconnaissance stimulants ou d’un climat de travail convivial, les PME doivent prendre conscience de leurs avantages concurrentiels face aux grandes entreprises et les mettre en valeur dans leurs stratégies de recrutement. (Voir l’image 2 ci-dessous)

  3. Investir dans sa marque employeur

    Il est à la portée de toutes les PME de se développer une marque employeur attirante. Toute PME peut mettre en valeur son logo et ses couleurs d’entreprise de façon cohérente dans ses documents et dans ses lieux de travail. Avec un petit budget, il est possible d’investir dans des photos corporatives ou même des vidéos qui mettront en valeur les installations, les produits, les projets et surtout, les employés de l’organisation. Ce matériel peut ensuite être utilisé sur le site web, sur les médias sociaux et sur les plateformes de recrutement.

    Avec l’omniprésence des médias sociaux, il faut d’ailleurs prendre conscience que chaque employé devient ambassadeur de son organisation. Trop de PME négligent l’importance d’avoir des profils LinkedIn bien montés et professionnels pour leurs employés et leur entreprise. Il faut garder en tête que les candidats ont accès facilement à ces profils. L’image projetée par des employés sur les différentes plateformes numériques d’une organisation peut grandement influencer l’ouverture d’un candidat à l’idée de travailler avec vous.

  4. Éviter de se cloner et de capitaliser sur le plein développement des forces de chacun

    Dans l’urgence, les entrepreneurs, étant généralement des gens d’action, ont souvent le réflexe de vouloir « cloner » leurs bons employés. Or, dans un contexte où les équipes sont restreintes, il ne faut pas présumer que deux employés aux profils identiques connaîtront le même succès. Au contraire, ils risquent de se faire concurrence pour obtenir le même type de responsabilités. Partant du principe qu’il est plus facile d’exceller dans ses forces que de devenir « bon » dans ses faiblesses, les PME ont avantage à faire l’analyse de la répartition des tâches au sein de leurs équipes pour identifier les tâches « mal aimées » ou « négligées ». De cette façon, on mettra l’accent sur le recrutement de ressources complémentaires à l’équipe, permettant ainsi aux employés en poste de se concentrer sur ce qu’ils aiment et sur ce dans quoi ils excellent. En intégrant les valeurs organisationnelles comme fil conducteur entre les différents employés, on se retrouvera avec une équipe équilibrée qui sera unie, performante et engagée. (Voir l’image 3 ci-dessous)

  5. Gérer le capital humain comme toute autre forme d’investissement

    Les entrepreneurs connaissent l’importance de bien gérer les investissements au sein de leur organisation. Le capital humain ne devrait pas différer à la règle. Ainsi, les PME qui investissent dans leur recrutement en formant leurs ressources, en instaurant les bons outils ou en se faisant accompagner par les bons partenaires connaîtront un meilleur succès.

    Le US Department of Labor and Statistics estime que le coût d’une mauvaise embauche se chiffre à 30 % du salaire annuel que l’employé sortant aurait gagné s’il était resté en poste. Un processus de recrutement bien structuré en vaut donc la peine. Les PME ont ainsi avantage à tout mettre en oeuvre pour bien recruter mais, compte tenu de la rareté de la main-d’œuvre à laquelle nous nous heurtons, il faut aussi positionner correctement le salaire des employés par rapport au marché. L’investissement en capital humain englobe donc les efforts pour trouver les ressources, les intégrer, les former et les rémunérer adéquatement.

Conclusion

En cette ère où règne une réelle guerre des talents, les PME doivent utiliser leurs habiletés tactiques et stratégiques pour attirer et retenir les bons candidats. La clé du succès passe par un plan bien défini, duquel découleront une série d’actions proactives et des investissements significatifs. Une fois bien entourés, les dirigeants de PME se sentiront mieux appuyés et ils pourront faire croître leur organisation.

En terminant, ajoutons une suggestion pour les PME qui souhaitent augmenter davantage leurs investissements en capital humain : un bon programme de référencement d’employés, appuyé sur de solides pratiques RH, aura un effet multiplicateur sur leurs investissements. Les primes offertes aux employés dans le cadre d’un tel programme incitent ces derniers à recruter dans leurs réseaux respectifs. Les bons employés en poste auront un excellent pouvoir d’attraction sur leurs semblables. En plus de permettre de dénicher d’excellentes recrues à faible coût, cette stratégie est très motivante pour les employés.

Références bibliographiques

  • JULIEN, Germain (1993). « Les valeurs collectives de gestion dans la fonction publique québécoise : la perception des cadres ». Administration publique du Canada, vol. 36, no 3, pages 319-348.
  • HOLMES, Ryan (2013) « The Unexpectedly High Cost of a Bad Hire ». Publié sur LinkedIn le 16 juillet.

Voir aussi