L’un des grands changements que l’on voit prendre place au travail est celui de la valorisation des heures de travail. Travailler de longues heures n’est plus signe qu’on est un bon travailleur. Travailler moins, mais travailler mieux, c’est la nouvelle tendance.

Travailler moins, mais travailler mieux, c’est la nouvelle tendance. Les changements démographiques et les nouveaux standards de rendement (axés sur les résultats plutôt que sur les heures de présence) influencent l’émergence de mesures flexibles.

À moins de revenir d’un périple de dix ans sur Pluton, il n’est un secret pour personne que le monde du travail est actuellement en pleine effervescence et mutation. Le profil des travailleurs évolue, tout comme leurs besoins et aspirations. Pour éviter de voir fuir les talents, de se retrouver dans l’incapacité de combler des postes ou pire, de voir les opérations ralentir faute de main-d’œuvre qualifiée, les organisations doivent adapter leurs pratiques et faire preuve de flexibilité et d’agilité en matière de recrutement, d’attraction et de rétention des employés. L’innovation est de mise pour se démarquer dans un marché du travail qui est confronté à des bouleversements sans précédent.

En effet, on observe des facteurs de changement tels que le vieillissement de la population et l’émergence de nouvelles technologies, qui modifient les méthodes de travail. De plus, le taux de chômage est à son plus bas, le nombre de postes vacants est en hausse et les 25-54 ans vivent une période de plein emploi. Dans un rapport de l’Institut du Québec (2019), Sonny Scarfone et Mia Homsy révèlent que le départ à la retraite des baby-boomers, qui est déjà commencé, ne va que s’accentuer au cours de la prochaine décennie, nécessitant le remplacement de près du tiers de la main-d’œuvre actuelle.

Selon Scarfone et Homsy, pour faire face à cette réalité, « la flexibilité du travail constituera un enjeu de plus en plus déterminant pour accroître la participation au marché du travail d’un maximum de personnes ». Mais qu’est-ce que la flexibilité au travail? Selon Geneviève Provencher, fondatrice de Flow, « une entreprise est considérée comme flexible si elle fait preuve de souplesse dans ses pratiques de ressources humaines. En offrant des mesures flexibles à ses employés, elle permet de créer un équilibre entre la vie privée et le travail pour ainsi améliorer l’engagement des employés et augmenter leur productivité. » La flexibilité d’une entreprise a également un effet direct sur sa marque employeur, ce qui facilite grandement l’attraction de nouveaux talents. Des mesures telles que la flexibilité et les programmes de développement de carrière sont devenues pratiquement incontournables. Dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, les candidats peuvent se permettre d’être sélectifs, alors l’enjeu est grand.

Les principales mesures flexibles

Ces mesures sont celles qui sont généralement mises en place au sein des organisations flexibles. Il apparaît sans conteste qu’elles sont appréciées des employés en place, qui éprouvent un sentiment :

  • d’autonomie;
  • de contrôle sur leur charge de travail et les résultats obtenus;
  • d’engagement envers leurs projets, leur équipe et leur organisation;
  • de bien-être et d’équilibre;
  • de vivre une réduction du stress en lien avec le voyagement et les imprévus du quotidien.

Quant aux chercheurs d’emploi, la perspective de travailler pour un employeur qui se démarque par son désir de prendre soin de ses employés est de plus en plus attrayante. C’est également le constat que font Mercure, Vultur et Fleury dans leur article publié en 2012  « Valeurs et attitudes des jeunes travailleurs à l’égard du travail au Québec : une analyse intergénérationnelle ». « Les jeunes aujourd’hui cherchent l’expérience de travail. L’élément du bonheur, ce n’est pas d’avoir plus d’argent, mais d’être heureux et épanoui au travail. »

En plus de ces changements démographiques, le monde du travail vit une révolution en grande partie menée par la génération Y. Elle se poursuivra avec la génération Z, qui commence à faire son entrée dans le marché du travail. Ces deux générations, qui ont chacune leurs particularités, ont tout de même un point en commun : une quête d’autonomie, de collaboration, de bien-être et de flexibilité au travail. À ce renouveau générationnel s’ajoutent l’évolution et la transformation des modes de vie. En effet, le taux de participation des femmes au marché du travail, incluant celles qui ont des enfants, est en croissance constante. Les travailleurs en fin de carrière ou retraités souhaitent rester actifs et continuer à contribuer à la société. La réalité des proches aidants est de plus en plus présente, tout comme la monoparentalité. Les travailleurs qui sont de grands voyageurs et qui souhaitent explorer le monde sont plus nombreux. En résumé, la majorité de la population active ne vit plus que pour travailler : elle est à la recherche d’un meilleur équilibre pour s’épanouir. Comme le mentionne si bien Jacques Forest, CRHA, professeur titulaire à l’ESG UQAM et psychologue, « pour être heureuse, une personne a besoin d’être bien tant dans sa vie personnelle que dans sa vie professionnelle » (revue Gestion, 29 janvier 2019).

Taux de satisfaction à l’égard de l’équilibre travail-vie personnelle selon le type d’emploi

  • Permanent : 83,4 %
  • Saisonnier : 90,5 %
  • Emploi à durée déterminée : 81,9 %
  • Occasionnel ou sur demande : 76 %
  • Travailleur autonome : 86,9 %

(Source : Institut de la statistique du Québec, 2014)

Toutefois, comme le mentionnent Scarfone et Homsy, « le bien-être des travailleurs et la flexibilité du travail sont des aspects du marché de l’emploi encore peu documentés au Canada. Alors que les nouvelles technologies multiplient les possibilités quant à la flexibilité du travail, peu de données sont régulièrement mises à jour sur cette question. À ce chapitre, il serait donc intéressant de pouvoir suivre de façon systématique des mesures portant sur la conciliation travail-famille et des données plus explicites sur l’absentéisme au travail. » Il sera donc de la responsabilité des spécialistes en ressources humaines de se pencher sur la question, de documenter la mise en œuvre et l’influence de mesures flexibles, et d’instaurer des indicateurs de performance afin de faire le suivi sur les initiatives pour se positionner en tant que partenaire stratégique et agent de changement au sein de leur organisation.

La flexibilité au travail est bien plus qu’une tendance, c’est un enjeu de société qui a une influence directe sur le bonheur et le bien-être des employés, mais également de leur famille et de leur entourage. Il est évident qu’une culture organisationnelle ne se change pas du jour au lendemain, mais la flexibilité est en train de devenir un incontournable pour les employeurs qui souhaitent se démarquer, attirer, retenir et mobiliser leurs talents. « Le fait de donner une perception de richesse de temps est bénéfique à la fois pour la personne qui en bénéficie, mais aussi pour l’employeur », selon Jacques Forest (Radio-Canada, 19 septembre 2016). Tout le monde y gagne.

Prenons part à ce virage, à l’avantage de tous!

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